#10 Item 299 : Tumeurs intracrâniennes de l’adulte


Épidémiologie
Étiologie des tumeurs intracrâniennes
Présentations cliniques
Examens complémentaires
Formes selon le type histologique
Principes des traitements
Autres éléments de la prise en charge


Situations de départ

12 Nausées.
13 Vomissements.
28 Coma et autres troubles de conscience.
50 Malaise/perte de connaissance.
61 Syndrome polyuropolydypsique.
66 Apparition d’une difficulté à la marche.
118 Céphalée.
119 Confusion mentale/désorientation.
120 Convulsions.
121 Déficit neurologique sensitif et/ou moteur.
127 Paralysie faciale.
134 Troubles du langage et/ou phonation.
138 Anomalie de la vision.
143 Diplopie.
178 Demande/prescription raisonnée et choix d’un examen diagnostique.
180 Interprétation d’un compte rendu d’anatomopathologie.
181 Tumeurs malignes sur pièce opératoire/biopsie.
226 Découverte d’une anomalie du cerveau à l’examen d’imagerie médicale.
231 Demande d’un examen d’imagerie.
232 Demande d’explication d’un patient sur le déroulement, les risques et les bénéfices attendus d’un examen d’imagerie.
233 Identifier/reconnaître les différents examens d’imagerie (type/fenêtre/séquences/incidences/injection).
239 Explication préopératoire et recueil de consentement d’un geste invasif diagnostique ou thérapeutique.
251 Prescrire des corticoïdes par voie générale ou locale.
289 Consultation et suivi d’un patient épileptique.
297 Consultation de suivi en cancérologie.
327 Annonce d’un diagnostic de maladie grave au patient et/ou à sa famille.


Objectifs pédagogiques

  • Diagnostiquer une tumeur intracrânienne.
  • Identifier les situations d’urgence et planifier leur prise en charge.

Hiérarchisation des connaissances

Rang Rubrique Intitulé Descriptif
Définition Principaux types et localisations des tumeurs intracrâniennes Savoir distinguer : tumeur primitive/secondaire, de l’encéphale/des annexes, bénigne/maligne, fréquente/rare, sus- ou sous-tentorielle
Définition Tumeurs primitives intracrâniennes : SNC et annexes Connaître la distinction entre tumeur provenant du SNC et tumeur provenant de ses annexes
Définition Connaître les principaux types histologiques des tumeurs cérébrales Méningiome et adénome hypophysaire/tumeurs gliales de bas grade et de haut grade (glioblastome)/métastases
Prévalence, épidémiologie Tumeurs primitives intracrâniennes : différents types Connaître les principaux types de tumeurs primitives intracrâniennes et leur origine
Diagnostic positif Formes et symptômes cliniques Connaître les principaux tableaux cliniques devant faire évoquer une tumeur intracrânienne
Examens complémentaires Connaître la stratégie d’exploration en imagerie devant une tumeur intracrânienne de l’adulte Le scanner et l’IRM sans et avec injection permettent d’évoquer le diagnostic de tumeur mais l’IRM est plus performante pour le diagnostic et le bilan préopératoire
Diagnostic positif Tumeurs secondaires intracrâniennes : recherche du cancer primitif Décrire la recherche systématique de cancer primitif à effectuer devant une métastase cérébrale
Identifier une urgence Savoir évoquer une HTIC, une épilepsie chez un patient porteur d’une tumeur intracérébrale Connaître les deux principales urgences (HTIC, épilepsie) révélant ou compliquant l’évolution d’une tumeur cérébrale
Suivi et/ou pronostic Connaître les principes de la prise en charge de l’HTIC et de l’épilepsie chez un patient porteur d’une tumeur intracérébrale

Pour comprendre

Les tumeurs intracrâniennes regroupent les tumeurs du système nerveux central (SNC) et de ses enveloppes/annexes (c’est-à-dire principalement méninges et nerfs crâniens). Elles constituent un ensemble complexe et hétérogène d’entités anatomopathologiques dont l’expression clinique peut être comparable. Selon leur topographie, on distingue les tumeurs extraparenchymateuses (ou extra-encéphaliques, extra-axiales) qui naissent des (ou s’implantent sur les) enveloppes et annexes, des tumeurs intraparenchymateuses (ou intra-encéphaliques, intra-axiales) qui posent des problèmes diagnostiques et thérapeutiques très différents. On distingue également deux grands cadres nosologiques dans la classification des tumeurs intracrâniennes : les tumeurs primitives, originaires des constituants de la boîte crânienne, et les tumeurs secondaires, autrement dit les métastases d’un cancer d’un autre organe.

Selon la terminologie de la 10e Classification internationale des maladies (CIM-10), les tumeurs primitives du SNC peuvent être bénignes, avoir une évolution imprévisible, ou être malignes. La classification TNM n’est pas utilisable pour les tumeurs primitives du SNC. La plus récente version de la classification des tumeurs primitives du SNC de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) date de 2021. Elle intègre de nouvelles données de biologie moléculaire et elle reconnaît toujours quatre grades de malignité (voir plus loin).


I Épidémiologie


  • Les tumeurs intracrâniennes sont rares : chaque année en France, on dénombre environ 13 000 nouveaux cas.
  • Chez l’adulte, les trois types histologiques les plus fréquents sont (par ordre décroissant) les métastases, les gliomes, les méningiomes.
  • L’incidence des métastases et des glioblastomes augmente après 60 ans.
  • Chez l’adulte, la topographie est principalement supratentorielle (environ 85 %) ; c’est l’inverse chez l’enfant.
  • Prédominance féminine : le méningiome ; prédominance masculine : tous les autres types histologiques.

Les tumeurs intracrâniennes sont rares. En France, leur incidence est d’environ 20 cas/100 000 habitants/an. À titre de comparaison, l’incidence du cancer du sein est de 100 cas/100 000 habitants/an et celle du cancer de la prostate de 80 cas/100 000 habitants/an.

L’incidence des tumeurs primitives du SNC tend à augmenter pour des raisons mal définies. L’incidence des gliomes de l’adulte (toutes histologies confondues) est de 8 cas/100 000 habitants/an, celle des méningiomes symptomatiques de 5 cas/100 000 habitants/an, celle des adénomes de l’hypophyse de 5 cas/100 000 habitants/an, celle des lymphomes primitifs du SNC de 3 cas/100 000 habitants/an, et celle des schwannomes (neurinomes) de 2 cas/100 000 habitants/an. Le reste est composé de types histologiques beaucoup plus rares.

Les tumeurs secondaires ou métastases sont sept fois plus fréquentes que les tumeurs primitives du SNC. Elles sont présentes dans 20 à 40 % des cancers en fonction de la méthode de dépistage (autopsie, imagerie, signes cliniques). L’incidence globale des métastases cérébrales n’est pas connue précisément (entre 20 et 80 cas/100 000 habitants/an), mais elle est également en augmentation. L’épidémiologie des métastases du SNC est liée à celle du cancer dit « primitif », c’est-à-dire à sa fréquence dans la population générale et à sa capacité à générer des métastases cérébrales (c’est-à-dire cancer « neurophile » ou « neurotrope »). Par ordre décroissant, l’origine des métastases provient des cancers suivants : cancer bronchopulmonaire, cancer du sein, mélanome, cancer du rein, cancer du tube digestif. Aucun cancer primitif n’est retrouvé dans 5 à 10 % des cas lors du diagnostic de métastase cérébrale. En revanche, environ 20 % des métastases du SNC inaugurent la maladie.

Au total, les trois types histologiques les plus fréquents sont (par ordre décroissant) : métastases, gliomes et méningiomes.

Chez l’adulte, les tumeurs du SNC se répartissent selon la topographie suivante : 85 % siègent à l’étage supratentoriel (c’est-à-dire au-dessus de la tente du cervelet), 10 % à l’étage infratentoriel (en dessous de la tente du cervelet) et 5 % à l’étage spinal (intramédullaire ou intradural extramédullaire).

Chez l’enfant, l’épidémiologie des tumeurs intracrâniennes est très différente. L’incidence est quatre fois inférieure, autour de 4 cas/100 000 habitants/an, mais elles représentent 25 % de la totalité des cancers. La majorité des tumeurs intracrâniennes sont localisées à l’étage infratentoriel. Les types histologiques sont également différents. Les principaux types histologiques retrouvés sont le médulloblastome, l’épendymome et l’astrocytome pilocytique, et il existe deux types histologiques spécifiques de la ligne médiane : le craniopharyngiome et les tumeurs de la région pinéale.

II Étiologie des tumeurs intracrâniennes


Dans la majorité des tumeurs intracrâniennes, les facteurs favorisants ne sont pas clairement identifiés.


A Origine génétique

Rarement, une phacomatose ou un syndrome de prédisposition génétique peut être retrouvé :

  • sclérose tubéreuse de Bourneville : maladie génétique due à une mutation sur le gène TSC1 (chromosome 9) ou TSC2 (chromosome 16). Sa prévalence est de 1/15 000 à 1/8 000. Elle regroupe, de façon très variable d’un malade à l’autre, différentes atteintes :
    • cérébrales : tubers corticaux (hamartomes) parfois responsables d’épilepsie, nodules sous-épendymaires (NSE) et astrocytomes sous-épendymaires à cellules géantes (SEGA) pouvant provoquer une hydrocéphalie obstructive,
    • cutanées (angiofibrome), rétiniennes (phacome, hamartome), rénales (angiomyolipome), cardiaques (rhabdomyome) ;
  • maladie de von Hippel-Lindau : maladie due à une mutation du gène suppresseur de tumeur VHL (chromosome 3). Sa prévalence est de 1/53 000. Elle regroupe différentes atteintes :
    • cérébrales : multiples hémangioblastomes du cervelet (parfois du tronc, de la moelle épinière ou supratentoriels),
    • rétiniennes (hémangioblastome), surrénales (phéochromocytome), rénales (adénocarcinome à cellules claires), pancréatiques et labyrinthiques (tumeur du sac endolymphatique) ;
  • neurofibromatose de type 1 (ou maladie de Von Recklinghausen) : maladie due à une mutation du gène suppresseur de tumeurs NF1 (chromosome 17). Sa prévalence est de 1/4 000. Elle regroupe différentes atteintes :
    • neurologiques (gliome des voies optiques avant l’âge de 6 ans, gliomes cérébraux, neurofibromes des nerfs crâniens, des racines spinales ou des nerfs périphériques),
    • cutanées (neurofibromes cutanés, taches « café au lait », lentigines),
    • autres : oculaires (hamartomes iriens ou nodules de Lisch), osseuses, viscérales, endocriniennes, vasculaires ;
  • neurofibromatose de type 2 : maladie due à une mutation du gène suppresseur de tumeur NF2 (chromosome 22). Sa prévalence est de 1/40 000. Elle regroupe différentes atteintes neurologiques et ophtalmologiques :
    • schwannome vestibulaire uni- ou bilatéral chez le sujet jeune < 30 ans,
    • méningiomes, épendymomes, plus rarement astrocytomes,
    • cataracte juvénile, hamartomes rétiniens ;
  • syndrome de Li-Fraumeni : syndrome de prédisposition génétique à transmission autosomique dominante engendrant diverses tumeurs, dont les tumeurs cérébrales. Il est dû à une mutation du gène TP53 dans 70 % des cas. Sa prévalence est de 1 à 9/100 000.

B Origine hormonale

Une origine hormonale doit être évoquée devant le diagnostic de méningiome. Cette entité est plus fréquente chez la femme ; des récepteurs aux œstrogènes et à la progestérone sont souvent surexprimés par la tumeur ; d’authentiques cas induits par la prise d’acétate de cyprotérone (Androcur®), acétate de nomégestrol (Lutényl®) ou acétate de chlormadinone (Lutéran®) ont été décrits (avec dans la majorité des cas une régression du méningiome après l’arrêt du médicament). L’association entre méningiome intracrânien et cancer du sein est également classique.

C Autres origines

Certaines tumeurs intracrâniennes peuvent être radio-induites (notamment méningiomes et lymphomes) après une irradiation à visée thérapeutique (traitement d’hémopathies malignes ou de tumeurs cérébrales dans l’enfance) ou accidentelle. Le délai entre la radiothérapie et la survenue de la tumeur radio-induite est variable mais généralement de plusieurs années.

L’imputabilité de la consommation tabagique et de certains pesticides est probable ; celle des téléphones portables n’est pas aujourd’hui prouvée mais le principe de précaution doit s’appliquer.

Dans le cadre des métastases intracrâniennes, aucune donnée épidémiologique spécifique à la survenue de métastases intracrâniennes n’est connue. L’épidémiologie est en grande partie liée au cancer primitif (tabac pour le cancer pulmonaire, exposition aux rayonnements solaires et UV pour le mélanome, etc.).

III Présentations cliniques

  • Les symptômes et signes d’appel des tumeurs intracrâniennes sont regroupés en quatre grands syndromes :
  • syndrome d’hypertension intracrânienne (HTIC) ;
  • syndrome focal, de localisation, ou « déficitaire » ;
  • épilepsie ;
  • syndrome endocrinien.

Ces syndromes peuvent être isolés ou associés lors de la révélation de la tumeur. L’âge du patient, le siège de la tumeur et sa vitesse de développement sont des éléments importants qui vont influer sur le tableau clinique.

Enfin, dans environ 5 % des cas la découverte est fortuite ; cette éventualité est loin d’être rare et augmente avec la facilitation de l’accès aux imageries cérébrales.

A Syndrome d’hypertension intracrânienne

Quelle que soit la cause, une HTIC résulte de l’augmentation de volume d’un des trois compartiments cérébraux (secteur liquidien, secteur parenchymateux, secteur vasculaire) à l’intérieur de la boîte osseuse crânienne qui est inextensible.

Concernant les tumeurs intracrâniennes, les causes suivantes peuvent conduire à une HTIC :

  • le volume de la tumeur en elle-même et l’œdème cérébral péritumoral qui concourent à augmenter le secteur parenchymateux ;
  • une hydrocéphalie, le plus souvent obstructive dans le cas de tumeurs intraventriculaires notamment, qui concourt à augmenter le secteur liquidien ;
  • une hémorragie intra- ou péritumorale (notamment pour les métastases de cancer du rein et de mélanome, parfois pour les méningiomes ou glioblastomes) qui concourt à augmenter les secteurs parenchymateux et vasculaire.

Les symptômes les plus évocateurs d’HTIC sont représentés par l’association céphalées-nausées-vomissements :

  • les céphalées sont souvent majorées par des situations créant une manœuvre de Valsalva qui augmente la pression veineuse intracrânienne (effort à glotte fermée : toux, défécation). Elles sont le plus souvent bitemporales, décrites comme une sensation d’étau. L’installation récente de céphalées inhabituelles et durables ou s’aggravant progressivement est, de manière plus générale, suspecte ;
  • les nausées et vomissements surviennent au maximum du pic douloureux. Les vomissements sont classiquement décrits comme faciles, en jet et soulageant les céphalées.
    Les troubles visuels sont le deuxième type de symptômes, pouvant survenir indépendamment des céphalées-nausées-vomissements.
  • La baisse d’acuité visuelle, d’aggravation plus ou moins rapide, témoigne d’un œdème papillaire de stase. Elle doit être considérée comme une urgence thérapeutique car la complication majeure – la cécité par atrophie optique – peut survenir rapidement une fois l’œdème papillaire de stase installé. La présence au fond d’œil de foyers hémorragiques en flammèche et d’exsudats, en sus de l’œdème papillaire, constitue un signe de gravité. Le bilan initial ophtalmologique, en cas d’œdème papillaire au fond d’œil, comporte un champ visuel. En effet, une altération du champ visuel accompagnant l’œdème papillaire est un signe de gravité et un élément important pour le suivi de la fonction visuelle après traitement de l’HTIC.
  • Une diplopie binoculaire horizontale par atteinte uni- ou bilatérale du nerf abducens (sixième nerf crânien [VI]) est parfois rencontrée. L’atteinte du VI plutôt que des autres nerfs oculomoteurs est expliquée par son long trajet cisternal exposant ce nerf à l’HTIC. Une atteinte du VI dans le cadre d’une HTIC n’a aucune valeur localisatrice, c’est-à-dire qu’elle ne préjuge pas de la localisation de la masse à l’origine de l’HTIC.
  • Des éclipses visuelles peuvent apparaître. Il s’agit d’impressions furtives de brouillard obscurcissant la vue.

B Déficit focal

Un déficit focal est un trouble d’une fonction neurologique permettant de localiser la région cérébrale atteinte. Concernant les tumeurs intracrâniennes, contrairement aux pathologies vasculaires qui provoquent un déficit brutal, le mode d’installation est progressif, en « tache d’huile », plus ou moins rapidement évolutif selon la vitesse de croissance de la tumeur.

Un déficit focal peut être :

  • moteur, par atteinte du cortex moteur ou du faisceau corticospinal (faisceau pyramidal) ;
  • sensitif, par atteinte du cortex somesthésique primaire ou des voies lemniscales ou extralemniscales ;
  • cognitif, par atteinte des réseaux de la cognition sociale (syndrome frontal), des réseaux du langage et de la lecture (aphasie, alexie), des réseaux de la cognition spatiale (héminégligence visuospatiale) ;
  • visuel, par atteinte du cortex occipital ou des voies optiques (nerf optique, chiasma, tractus et radiations optiques) ;
  • cérébelleux, par atteinte d’un hémisphère ou du vermis.

C Épilepsie

Une crise d’épilepsie est définie par la survenue d’une décharge hypersynchrone et paroxystique d’un groupe de neurones plus ou moins étendu.

Dans la grande majorité des cas, une épilepsie d’origine tumorale est focale/partielle (simple ou complexe) ou à début focal puis secondairement généralisée, car elle est induite par une irritation d’une zone de cortex cérébral située à proximité de la tumeur. La crise d’épilepsie focale revêt alors un caractère localisateur (l’analyse sémiologique de l’épilepsie permet de diagnostiquer la localisation de la tumeur cérébrale). Par exemple, une crise d’épilepsie partielle motrice bravais-jacksonienne oriente vers une tumeur corticale au niveau de la circonvolution frontale ascendante (cortex moteur primaire). Plus rarement, l’épilepsie peut être d’emblée généralisée.

La présence d’une épilepsie lésionnelle/symptomatique d’origine tumorale est d’autant plus fréquente que la tumeur est d’évolution lente (bénigne ou de bas grade de malignité).

La survenue d’une première crise d’épilepsie chez un adulte doit faire systématiquement réaliser une imagerie cérébrale.

D Anomalies endocriniennes

Les anomalies endocriniennes sont le fait de tumeurs intéressant soit la région hypothalamo-hypophysaire, soit la région pinéale.

  • Les adénomes hypophysaires, qui représentent la grande majorité des tumeurs de l’antéhypophyse, peuvent provoquer :
    • une hypersécrétion hormonale : syndrome de Cushing par hypersécrétion d’hormone adrénocorticotrope (ACTH) pour les adénomes corticotropes (ou maladie de Cushing), acromégalie par hypersécrétion d’hormone de croissance (growth hormone [GH]) pour les adénomes somatotropes, syndrome d’aménorrhée/galactorrhée par hypersécrétion de prolactine pour les adénomes lactotropes (ou prolactinome), syndrome d’hyperthyroïdie par hypersécrétion de TSH (thyroid stimulating hormone) pour les adénomes thyréotropes ;
    • une hyposécrétion hormonale : par une compression d’un macroadénome hypophysaire sur l’antéhypophyse saine, réalisant un défaut de sécrétion hormonale d’une ou plusieurs lignées antéhypophysaires (lactotrope, thyréotrope, corticotrope, somatrotrope, gonadotrope) en parallèle d’une possible hypersécrétion et pouvant donner un tableau clinicobiologique de panhypopituitarisme plus ou moins profond ;
    • un syndrome de déconnexion de la tige pituitaire : par une compression d’un macroadénome sur la tige pituitaire, entraînant la perte du contrôle freinateur de l’hypothalamus sur la sécrétion de prolactine par l’antéhypophyse, donnant une hyperprolactinémie modérée, dite de déconnexion.
  • Les craniopharyngiomes, tumeurs de la ligne médiane au niveau de la région sellaire et suprasellaire, peuvent entrer au contact de l’hypothalamus, provoquant un tableau de puberté précoce chez l’enfant et des troubles du comportement alimentaire (cachexie, boulimie).
  • La posthypophyse, régulant la rétention d’eau via la sécrétion d’hormone antidiurétique, peut entraîner si elle est lésée un diabète insipide (polyuropolydipsie, hypodensité urinaire < 1 005).

À chaque tumeur son mode de révélation
De façon schématique :

  • syndrome cérébelleux ± HTIC ± hydrocéphalie obstructive : tumeur infratentorielle ;
  • déficit neurologique focalisé ± HTIC : tumeur cérébrale maligne (gliome malin, métastase), plus rarement un méningiome ;
  • épilepsie focale inaugurale = tumeur d’évolution lente : gliome de bas grade de malignité, méningiome ;
  • syndrome endocrinien : adénome hypophysaire, craniopharyngiome.

À chaque âge son gliome


De façon schématique :

  • gliome de grade I OMS : avant 20 ans ;
  • gliome diffus de grade II OMS : entre 20 et 40 ans ;
  • gliome diffus de grade III OMS : entre 30 et 50 ans ;
  • glioblastomes (grade IV OMS) : au-delà de 50 ans.

Diagnostic d’une tumeur intracrânienne

Diagnostiquer une tumeur intracrânienne :

  • c’est savoir examiner un patient (interrogatoire, examen neurologique) ;
  • c’est l’évoquer devant toute céphalée inhabituelle, subaiguë et d’intensité croissante ;
  • c’est l’évoquer devant tout déficit neurologique d’aggravation progressive ;
  • c’est l’évoquer devant tout trouble du comportement récent chez l’adulte ;
  • c’est l’évoquer devant toute crise d’épilepsie inaugurale ;
  • c’est demander une imagerie cérébrale sans et avec injection.

IV Examens complémentaires

A Quels examens ?

L’IRM cérébrale est l’examen de référence pour le bilan d’une tumeur du SNC. Le scanner (ou tomodensitométrie, TDM) cérébral(e) est, en pratique, souvent réalisé(e) en urgence en première intention du fait de sa plus grande facilité de réalisation (durée d’examen moins longue, pas de contre-indication liée à la présence d’un stimulateur cardiaque ou neurologique, de corps étrangers métalliques), bien qu’il (elle) soit moins sensible et moins précis(e) que l’IRM.
En cas de suspicion de tumeur intracrânienne, ces examens doivent être réalisés sans puis avec injection de produit de contraste, dans le respect des contre-indications.

Les objectifs de l’imagerie sont les suivants :

  • diagnostic positif : l’image attendue est celle d’une image anormale ajoutée, occupant de l’espace et responsable d’une compression appelée effet de masse ;
  • diagnostic des conséquences/complications : évaluer une HTIC, dépister un engagement, un œdème, une hydrocéphalie, un saignement ;
  • discussion des options thérapeutiques : si un scanner cérébral a été réalisé et met en évidence une tumeur, l’IRM reste capitale dans la définition topographique de la tumeur (géométrie, taille, localisation, limites avec le parenchyme cérébral, nombre, etc.) et doit donc être réalisée pour ensuite discuter des options thérapeutiques ;
  • enfin, dans le cadre d’une métastase, il est impératif de rechercher le cancer primitif par un bilan d’extension comprenant un scanner thoraco-abdomino-pelvien et, en cas de négativité, une tomographie par émission de positons (TEP-scanner) en sus du bilan spécifique à chaque cancer.
    Certains examens sont peu voire pas utiles :
    la radiographie du crâne n’a aucun intérêt ;
    un électroencéphalogramme (EEG) peut être d’un grand intérêt dans l’aide au diagnostic de crises d’épilepsie, lorsque la présentation sémiologique est atypique ou l’interrogatoire difficile ;

    une polyglobulie peut être notée en association avec un hémangioblastome (sécrétion d’érythropoïétine par la tumeur).

B Sémiologie radiologique

En IRM, les deux séquences les plus utiles sont la séquence pondérée en T1 après injection de gadolinium et la séquence FLAIR (fluid attenuation inversion recovery), qui est une séquence pondérée en T2 avec atténuation du signal du LCS.
Le plus fréquemment, une tumeur est en hyposignal T1 (elle apparaît plus « sombre » que le parenchyme cérébral), en hypersignal T2/FLAIR (elle apparaît plus « claire » que le parenchyme cérébral). Les méningiomes, schwannomes et tumeurs malignes (métastases, gliomes de grade III ou IV) se rehaussent après injection de gadolinium. Il existe deux exceptions principales :

  • les tumeurs hémorragiques apparaissent en hypersignal T1 spontané à la phase subaiguë, pouvant masquer une prise de contraste ;
  • les lésions dont le contenu est riche en graisse (lipomes, kystes dermoïdes) apparaissent en hypersignal spontané sur les séquences T1 et T2.

Des séquences spéciales d’IRM multimodales (diffusion, spectroscopie, perfusion) peuvent apporter des précisions sur la nature de la tumeur en mesurant des composantes spécifiques dans une zone choisie au sein de l’image tumorale.


IRM multimodale

Il est possible d’associer des séquences « anatomiques/morphologiques », « fonctionnelles » et « métaboliques » pour le diagnostic des tumeurs intracrâniennes :

  • séquences « anatomiques » : T1, T2 (LCS), FLAIR (œdème), T2 écho de gradient (saignement), injection (rupture de la barrière hémato-encéphalique), diffusion (œdème extracellulaire vasogénique/intracellulaire cytotoxique), angiogramme (reconstruction du réseau artériel, veineux) ;
  • séquences « fonctionnelles » : effet BOLD (blood oxygen level dependent) pour la localisation des régions corticales du langage, de la motricité ;
  • séquences « métaboliques » : spectroscopie (activité métabolique de la tumeur), perfusion (qualité de vascularisation du parenchyme).

L’intérêt du scanner est :

  • sa facilité d’utilisation à la phase aiguë (chez un patient agité ou dans le coma) ;
  • sa sensibilité pour l’exploration du contingent osseux de certaines tumeurs pouvant envahir la base ou la voûte du crâne (par exemple méningiomes) ;
  • la recherche de calcifications au sein de la tumeur, signant généralement une évolution lente.

L’analyse sémiologique au scanner est la suivante :

  • caractéristiques de la tumeur : hypodensité (nécrose, gliome de bas grade), hyperdensité spontanée (calcifications ou hémorragie) ;
  • retentissement de la tumeur : hypodensité périphérique (œdème), effet de masse (effacement des sillons, déviation de la ligne médiane), augmentation de la taille des ventricules (hydrocéphalie) ;
  • après injection, il faut étudier, comparativement aux images non injectées, si :
    • la lésion reste hypodense : il s’agit alors d’une tumeur de bas grade, de nécrose, ou d’œdème,
    • la lésion devient hyperdense (de manière homogène ou hétérogène) : il s’agit alors d’un méningiome, d’un neurinome, d’une métastase, ou d’un gliome de haut grade.

C Diagnostic différentiel

1 Accident vasculaire cérébral (AVC)

La présentation clinique diffère par le délai d’installation des signes : le début brutal (en quelques minutes) de l’AVC contraste avec l’installation progressive de la tumeur (fig. 10.1). Dans l’AVC ischémique, le tableau clinique est systématisé, c’est-à-dire qu’il correspond à un territoire vasculaire. Le bilan d’imagerie permet de trancher. Attention, un AVC ischémique ancien (par exemple de diagnostic tardif, plusieurs jours après le début des symptômes) peut être difficile à différencier d’un gliome de haut grade du fait de la rupture de barrière hémato-encéphalique survenant après l’ischémie, à l’origine de prises de contraste.


Fig. 10.1

Diagnostics différentiels d’une hypodensité au scanner sans injection.

A. AVC ischémique dans le territoire de l’artère cérébrale moyenne/sylvienne gauche : hypodensité à bords nets, bien systématisée. B. Œdème autour d’une lésion cérébrale (ici non encore démasquée en l’absence d’injection), avec une hypodensité « en doigts de gant » de la substance blanche. C. Hypodensité temporale antérieure dans le cadre d’une encéphalite herpétique.


2 Hématome intraparenchymateux en cas de tumeur hémorragique (métastases de cancer du rein ou de mélanome, glioblastome)

Dans le cas d’un hématome intracérébral pour lequel on suspecte une tumeur sous-jacente, une IRM cérébrale doit être répétée quelques semaines après l’événement hémorragique pour révéler une tumeur sous-jacente à l’origine du saignement, une fois celui-ci résorbé.

3 Abcès cérébraux

Les abcès cérébraux ont le plus souvent une évolution rapide (quelques jours à quelques semaines). Ils évoluent cliniquement à une vitesse intermédiaire entre celle des AVC (quelques minutes à quelques heures) et celle des tumeurs (quelques semaines à quelques mois) (fig. 10.2).


Fig. 10.2

IRM de diffusion pour le diagnostic différentiel entre une tumeur intraparenchymateuse et un abcès cérébral.

Les séquences classiques (T2, T1 avec injection de gadolinium) ne permettent pas toujours de faire la différence. En revanche, la séquence de diffusion permet d’analyser la mobilité/diffusion des molécules d’eau contenues dans la partie centrale/kystique de la lésion : augmentée (et donc visible en hyposignal, comme le LCS) dans le cadre d’une nécrose tumorale (où les molécules d’eau circulent librement) ; abaissée (hypersignal) dans le cadre d’un abcès (où le mouvement des molécules d’eau est contraint par la viscosité du pus).


Les abcès à pyogènes sont classiquement arrondis, bien circonscrits, avec une paroi plus homogène et surtout plus fine qu’une tumeur, mais le diagnostic différentiel est souvent fait grâce à la séquence de diffusion : la portion centrale de l’abcès apparaît en restriction de diffusion – le pus étant très épais, les molécules d’eau sont peu mobiles et ne diffusent pas ; le coefficient apparent de diffusion (apparent diffusion coefficient, ADC) est donc bas –, contrairement à la nécrose centrale des métastases ou des glioblastomes qui sont les deux diagnostics différentiels à envisager.

4 Maladies inflammatoires

Les lésions pseudotumorales des maladies inflammatoires sont rarement inaugurales (sclérose en plaques pseudotumorale).

V Formes selon le type histologique


Classification histopathologique des tumeurs intracrâniennes

Très schématiquement, on pourra distinguer :

  • tumeurs secondaires/métastases du SNC ;
  • tumeurs primitives de la lignée gliale : astrocytomes, oligodendrogliome, épendymomes, médulloblastomes ;
  • tumeur de la lignée lymphocytaire B : lymphomes malins cérébraux primitifs ;
  • tumeurs primitives des enveloppes : méningiomes (tumeurs de l’arachnoïde), schwannomes/neurinomes (tumeurs de la gaine des nerfs crâniens) ;
  • autres tumeurs primitives :
    • tumeurs vasculaires (hémangioblastome, hémangiome caverneux/cavernome),
    • tumeurs de l’axe hypothalamo-hypophysaire (adénome, craniopharyngiome),
    • tumeurs de la région pinéale,
    • kyste colloïde du troisième ventricule.

La classification internationale de référence est la classification de l’OMS, qui est révisée régulièrement (dernière version en 2021, intégrant à part entière la biologie moléculaire).


Classification de l’OMS

Cette classification OMS résulte d’un consensus, mais repose sur des critères morphologiques/histologiques parfois subjectifs et sur des critères de biologie moléculaire. Ces tumeurs sont classées en grades de I à IV selon leur degré de malignité :

  • le grade I (tumeurs bénignes) correspond à des tumeurs à croissance lente et normalement bien circonscrites, bien qu’elles puissent envahir de grandes régions du cerveau ;
  • le grade II correspond à des tumeurs à croissance lente mais, contrairement aux tumeurs de grade I, elles infiltrent le cerveau et leurs limites sont imprécises. On parle de gliome « diffus » de bas grade de malignité ;
  • le grade III (tumeurs malignes) correspond à des tumeurs anaplasiques qui infiltrent également le cerveau. Elles peuvent être diagnostiquées d’emblée à ce grade, ou bien se développer secondairement à partir d’une tumeur de plus bas grade de malignité. Leur évolution est plus rapide que celle des tumeurs de bas grade ;
  • le grade IV correspond à des tumeurs hautement malignes qui infiltrent également le cerveau (tableau 10.1). La plus fréquente est le glioblastome de novo, une tumeur survenant préférentiellement chez les sujets âgés (60 ans et plus). Ces tumeurs peuvent contenir divers types de cellules qui se multiplient rapidement et ont une forte tendance nécrosante spontanée. Elles sont mal délimitées.

Tableau 10.1

Corrélation entre critères histologiques et critères radiologiques pour une tumeur de grade IV OMS.

Critère histologique Densité cellulaire élevée avec atypies Index mitotique élevé Prolifération vasculaire Nécrose
Critère radiologique Tumeur intracrânienne Progression rapide Prise de contraste Nécrose

La nouvelle version 2021 de la classification OMS des tumeurs du SNC intègre, pour le diagnostic des gliomes, des données de biologie moléculaire aux données histologiques. Les deux principales mutations qui jouent un rôle pronostique majeur sont la mutation IDH (isocitrate déshydrogénase) et la codélétion 1p19q. Ces mutations sont recherchées sur le tissu tumoral (il ne s’agit donc pas de mutations constitutionnelles du patient, mais de transformations génétiques intratumorales). Elles permettent de classer les gliomes diffus et d’adapter au mieux la stratégie thérapeutique postopératoire (la décision sera alors prise en réunion de concertation pluridisciplinaire [RCP] de neuro-oncologie selon un faisceau d’arguments : surveillance seule, radiothérapie seule, type et timing de la chimiothérapie, etc.).


Ce qu’il faut retenir

  • La nouvelle classification OMS 2021 des tumeurs du SNC se fonde maintenant sur des critères histologiques et des marqueurs biomoléculaires (altérations cytogénétiques et moléculaires).

  • Le diagnostic histologique oriente vers la typologie de cellule (c’est un astrocyte, un oligodendrocyte, un épendymocyte, etc.), alors que le diagnostic biomoléculaire va contribuer au grading, au pronostic et aux propositions thérapeutiques.

Pour aller plus loin

Le tableau 10.2 indique la classification simplifiée des tumeurs gliales.
Tableau 10.2

Classification simplifiée des tumeurs gliales (d’après l’OMS, 2021*).

Gliomes diffus de l’adulte
Astrocytome, IDH muté
Oligodendrogliome, IDH muté et 1p/19q-codélété
Glioblastome, IDH non muté
Gliomes diffus pédiatriques
Gliomes astrocytaires circonscrits
Astrocytome pilocytique
Xanthoastrocytome pléomorphe
Tumeurs glioneuronales et neuronales
Gangliogliome
Tumeur neuroépithéliale dysembryoplasique (DNET)
Tumeurs épendymaires

* Cette nouvelle classification est importante car elle associe les critères morphologiques classiques (histologie) aux données biomoléculaires actuellement disponibles.
Source : Classification simplifié des tumeurs gliales, OMS 2021.

A Tumeurs primitives du système nerveux central

1 Gliomes diffus de l’adulte

Les gliomes diffus sont le deuxième type histologique de tumeurs intracérébrales le plus fréquent après les métastases. Ce sont donc les tumeurs cérébrales primitives les plus fréquentes.

Ils sont développés au sein du tissu de soutien des neurones : la glie. Deux types cellulaires sont impliqués : les astrocytes et les oligodendrocytes. Aujourd’hui, l’analyse histologique n’est plus suffisante pour caractériser un gliome. Plus que la morphologie, c’est la « signature moléculaire » qui permet de classer les gliomes en astrocytomes (présence d’une mutation IDH sans codélétion 1p19q), oligodendrogliomes (présence d’une mutation IDH et d’une codélétion 1p19q), et glioblastomes (absence de mutation IDH et absence d’une codélétion 1p19q). Nous détaillerons par la suite un troisième type de tumeur dérivant des cellules gliales : l’épendymome.

NB : La codélétion 1p19q ne peut exister que si une mutation IDH existe ; il n’existe pas de gliome diffus de l’adulte de grade I.

Gliomes de grade II

On parle aussi de gliomes diffus de bas grade de malignité. Le pic de survenue se situe le plus souvent entre 20 et 40 ans. Ce sont des tumeurs très épileptogènes avec une évolution prédiagnostique parfois très longue. Ce sont des tumeurs infiltrantes incurables qui constituent de véritables lésions précancéreuses dont l’évolution se fera inéluctablement vers une transformation en plus haut grade de malignité (grade III/IV) après en moyenne 8 à 10 ans d’évolution. La grossesse augmente le risque évolutif de ces gliomes. L’IRM multimodale est d’une grande utilité en montrant un hypersignal T2 et FLAIR (fig. 10.3) qui est constant et une néoangiogenèse absente ou modérée en séquence de perfusion. Les gliomes de grade II ne se rehaussent pas après injection de produit de contraste (fig. 10.4).


Fig. 10.3

IRM en séquence FLAIR.

Hyperintensité frontale droite en région prémotrice (flèche : sillon central/de Rolando droit). Astrocytome de grade II.


Fig. 10.4

IRM en séquence T1 sans (gauche) et après (droite) injection de produit de contraste.

Lésion intra-axiale, mal délimitée, frontale interne gauche, avec extension vers le corps calleux. Astrocytome de grade II.


Le pronostic des gliomes de grade II dépend de plusieurs facteurs, dont le plus important est la qualité de résection chirurgicale, raison pour laquelle ces tumeurs sont habituellement opérées en condition éveillée, permettant le meilleur compromis entre une étendue de résection tumorale maximale et une préservation des fonctions neurologiques grâce à la réalisation d’une cartographie fonctionnelle peropératoire.

Les oligodendrogliomes (présence d’une codélétion 1p19q) sont de meilleur pronostic que les astrocytomes. Bien que le traitement de référence soit la chirurgie maximale selon des limites fonctionnelles, on peut parfois discuter une radiothérapie et/ou une chimiothérapie.


Gliomes de grade II

  • Découverts généralement entre 20 et 40 ans, très souvent après une crise d’épilepsie.

  • Deux types histologiques : astrocytome, oligodendrogliome.
  • Le pronostic à long terme est mauvais : transformation anaplasique systématique.
  • Facteurs de bon pronostic : qualité de l’exérèse chirurgicale, présence d’une codélétion 1p19q, âge jeune et bon état clinique.
  • Facteurs de mauvais pronostic : état clinique altéré au moment du diagnostic, durée d’évolution.
  • Traitement chirurgical : discuter la chirurgie éveillée (exérèse maximaliste tout en préservant les régions cérébrales fonctionnelles).

    Gliomes de grade III
    Il existe les mêmes sous-types histologiques que dans les grades II. Ces gliomes surviennent principalement chez des sujets de 30 à 50 ans et sont souvent issus de la transformation maligne d’un gliome de grade II préexistant. Une prise de contraste et une hyperperfusion (augmentation du débit sanguin dans la tumeur sur les séquences de perfusion, témoin d’une néoangiogenèse) à l’IRM sont fréquentes. Histologiquement, on retrouve des atypies cytonucléaires avec des mitoses, une néoangiogenèse, mais pas de nécrose. Il s’agit d’une tumeur anaplasique (maligne) incurable, ce qui justifie une chirurgie maximaliste si cela est possible, suivie d’une radiothérapie et/ou d’une chimiothérapie.

Gliomes de grade IV
Ces gliomes correspondent aux glioblastomes, qui sont les tumeurs primitives du SNC à la fois les plus fréquentes et les plus malignes. Leur pic de survenue se situe entre 60 et 70 ans. Ils peuvent correspondre à la transformation maligne d’un gliome de plus bas grade de malignité : on parle alors de gliome de grade IV IDH muté. Le plus souvent, ils se forment de novo et on parle alors de glioblastome de grade IV IDH non muté. Histologiquement, on retrouve des atypies cytonucléaires avec des mitoses, une néoangiogenèse et de la nécrose (fig. 10.5), critères que l’on retrouve à l’imagerie sous la forme d’une tumeur intra-axiale, prenant le contraste de façon hétérogène, avec une nécrose centrale (fig. 10.6).


Fig. 10.5

Coupes histologiques d’un glioblastome au grossissement × 200.
A, B. Coloration hémalun-éosine (HE) : il s’agit d’une tumeur infiltrante, densément cellulaire, mal limitée, faite d’astrocytes tumoraux avec des atypies nucléaires et des mitoses en nombre important. Il existe une prolifération vasculaire (néoangiogenèse) avec des plages de nécrose. C, D. Immunomarquage avec les marqueurs de la lignée gliale (GFAP et Olig2) exprimés par les cellules tumorales.



Fig. 10.6

Trois exemples de glioblastomes en imagerie.
A. IRM injectée, montrant une tumeur hétérogène (hyperintensité = prise de contraste, hypo-intensité = nécrose) localisée au niveau du carrefour pariéto-occipito-temporal droit. On constate également un œdème (hypo-intensité) péritumoral « en doigts de gant ». B. Scanner injecté, montrant une volumineuse tumeur avec une nécrose centrale, prédominant en région frontale gauche mais également étendue vers le corps calleux et la région frontale droite. Il existe un œdème péritumoral (hypodensité, effacement des sillons). C. IRM injectée montrant un glioblastome temporal droit, avec un aspect en cocarde (prise de contraste périphérique et nécrose centrale) qui devra faire éliminer une métastase ou un abcès.


Le gliobastome est redoutable car il s’agit d’une tumeur avec une diffusion locorégionale importante, rendant illusoire la notion d’exérèse complète. La médiane de survie globale est inférieure à 18 mois, malgré l’application d’un traitement oncologique maximal. Moins de 5 % des patients sont en vie au-delà de 5 ans. Le pronostic est fonction de l’âge (défavorable > 70 ans), de l’état fonctionnel du patient apprécié par le score OMS (tableau 10.3 ; moins mauvais pour les patients autonomes), de la localisation (une localisation profonde est synonyme d’une survie courte) et de la qualité de l’exérèse chirurgicale (plus l’exérèse est large, meilleur est le pronostic).
Tableau 10.3

Échelle de dépendance de l’OMS*.

Activité Score
Capable d’une activité identique à celle précédant la maladie 0
Activité physique diminuée, mais ambulatoire et capable de mener un travail 1
Ambulatoire et capable de prendre soin de soi-même. Incapable de travailler et alité moins de 50 % du temps 2
Capable seulement de quelques activités. Alité ou en chaise plus de 50 % du temps 3
Incapable de prendre soin de soi-même. Alité ou en chaise en permanence 4

* L’autonomie du patient mesurée avec cette échelle fait partie du bilan clinique, puisque plus le score OMS est haut et plus le pronostic est défavorable.
Source : Echelle de dépendance, OMS.

La présence d’une hyperméthylation du promoteur du gène MGMT (codant la O6-méthylguanine-ADN méthyltransférase) apparaît de meilleur pronostic.

Le traitement repose sur une chirurgie maximaliste, si possible associée à une radiothérapie avec chimiothérapie concomitante suivie d’une chimiothérapie adjuvante par témozolomide (selon le protocole Stupp).


Les facteurs de mauvais pronostic des glioblastomes sont :

  • l’âge avancé (> 70 ans) ;
  • le statut clinique (score OMS 3-4) ;
  • la faible qualité de l’exérèse chirurgicale ;
  • l’absence de traitement adjuvant (chimiothérapie, radiothérapie) ;
  • l’absence d’hyperméthylation du promoteur du gène MGMT.

    2 Gliomes circonscrits de grade I

    Il s’agit des astrocytomes pilocytiques. Ce sont des tumeurs bénignes circonscrites, de grade I, survenant essentiellement avant 20 ans. Les localisations principales sont la fosse postérieure (classique astrocytome pilocytique kystique du cervelet) et le diencéphale (hypothalamus, chiasma optique, thalamus).

3 Épendymomes

Les épendymomes dérivent des épendymocytes présents autour des ventricules (ou du canal central/épendymaire de la moelle épinière) et peuvent donc se développer aussi bien à l’étage supratentoriel qu’à l’étage infratentoriel. Ils s’organisent en « rosettes péri-épendymaires » sur les coupes histologiques. Chez l’adulte, en IRM, ils prennent volontiers le produit de contraste, sont au contact d’un ventricule et souvent supratentoriels (fig. 10.7). Ils sont souvent bénins (grade II), surtout dans les localisations médullaires. En revanche, ils ont un pronostic redoutable quand ils surviennent chez l’enfant de moins de 5 ans, avec la possibilité de métastases par voie liquidienne (LCS), le long des espaces sous-arachnoïdiens (voir chapitre 11).


Fig. 10.7

IRM en séquence T1 injectée.
Tumeur qui part du ventricule latéral gauche, rehaussée par le contraste, compatible avec un épendymome.


4 Médulloblastomes

Les médulloblastomes sont des tumeurs du cervelet qui surviennent surtout chez l’enfant (voir chapitre 11), parfois chez l’adulte jeune. L’IRM, là aussi, est l’examen clé (fig. 10.8). Les marqueurs biomoléculaires ont permis récemment d’identifier plusieurs formes à évolution plus ou moins favorable.


Fig. 10.8

À gauche, IRM en séquence T1 non injectée, coupe sagittale : tumeur intra-axiale du cervelet, hypo-intense, avec engagement des amygdales/tonsilles dans le foramen magnum et refoulement du quatrième ventricule vers le haut (risque d’hydrocéphalie obstructive). À droite, séquence T1 après injection de produit de contraste, coupe axiale : tumeur médiane, centrée sur le vermis, rehaussée par le contraste. Médulloblastome.


B Lymphomes cérébraux malins primitifs
Les lymphomes cérébraux malins primitifs ne représentent que 1 à 2 % des tumeurs intracrâniennes. Leur fréquence est plus élevée chez les patients de plus de 60 ans. Ils doivent être distingués des lymphomes présents chez l’immunodéprimé (VIH positif). Cliniquement, ce sont des patients qui présentent volontiers une confusion et des troubles des fonctions supérieures. L’imagerie est caractéristique, en montrant des anomalies sous la forme de lésions volontiers multiples, de topographie périventriculaire, rehaussées par le contraste de façon intense et homogène, avec un aspect en « coton » ou en « boule de neige », et avec une restriction du signal d’ADC sur la séquence de diffusion signant la forte densité cellulaire (fig. 10.9). Il n’existe pas de nécrose radiologique, hormis après l’introduction d’une corticothérapie et chez l’immunodéprimé. Histologiquement, ce sont des lymphomes B diffus à grandes cellules (haut grade de malignité) avec des marqueurs spécifiques (CD20 notamment). En cas de suspicion diagnostique, il ne faudra pas prescrire de corticoïdes car ils peuvent temporairement faire « disparaître » la tumeur sur l’imagerie et compromettre l’obtention d’un diagnostic histopathologique par biopsie. Plus l’âge est avancé, plus le pronostic est défavorable. La chirurgie se limite au diagnostic (biopsie), le traitement reposant sur l’association d’une chimiothérapie et d’une radiothérapie. Le pronostic oncologique est défavorable (ce sont des grades IV de l’OMS) et le statut cognitif est souvent altéré par cette tumeur très infiltrante.


Fig. 10.9

IRM en séquence T1 après injection de produit de contraste, coupes coronale (à gauche), axiale (au milieu), et en séquence FLAIR, coupe axiale (à droite).
Lésion intraparenchymateuse, rehaussée par le contraste, de topographie périventriculaire gauche, avec un important œdème (hypersignal FLAIR). Lymphome cérébral malin primitif.


C Tumeurs secondaires/métastases

Les métastases sont actuellement les tumeurs cérébrales les plus fréquentes.
Les trois cancers primitifs le plus fréquemment retrouvés sont le cancer bronchique (fig. 10.10), le cancer mammaire et le mélanome, puis, plus rarement, le cancer du rein et les cancers digestifs. Le diagnostic repose sur les antécédents, les signes radiologiques et surtout l’histologie. Les symptômes et signes cliniques sont les mêmes que pour les autres tumeurs intracrâniennes. L’aspect radiologique est parfois comparable à celui d’une tumeur primitive de haut grade de malignité, mais l’image caractéristique est volontiers « en cocarde », avec une prise de contraste périphérique et un centre nécrotique (fig. 10.11). Ainsi, face à une lésion cérébrale d’allure tumorale prenant le contraste « en cocarde », il convient d’évoquer de principe la métastase (20 % des métastases sont inaugurales, c’est-à-dire révélatrices du cancer primitif), mais aussi un glioblastome, et surtout d’éliminer un abcès (fig. 10.12). Parfois, les métastases se révèlent par un saignement qui peut être pris à tort pour un AVC hémorragique. Les types histologiques le plus à risque de complication hémorragique sont les métastases cérébrales de mélanome (fig. 10.13) et de cancer du rein (plus rarement de choriocarcinome et de cancer de la thyroïde). Les métastases sont fréquemment multiples, accompagnées d’œdème, réalisant parfois des images en « lâcher de ballons ». Les facteurs pronostiques tiennent compte du degré d’autonomie du patient (échelle de dépendance de l’OMS), de l’âge, du contrôle du cancer primitif et de la présence ou non de métastases extracrâniennes.


Fig. 10.10

À gauche, IRM en séquence T1 après injection de produit de contraste : tumeur intra-axiale, bien délimitée, frontale droite, rehaussée après injection, avec un œdème périlésionnel important. À droite, radiographie du thorax montrant une opacité arrondie du poumon droit. Métastase cérébrale d’un cancer bronchique.



Fig. 10.11

IRM en séquence T1 injectée (à gauche) et de diffusion (à droite).
Image typique d’une métastase, avec son aspect en cocarde (centre nécrotique, rehaussement périphérique). La séquence de diffusion (hyposignal ; diffusion non restreinte) a permis d’exclure un abcès.



Fig. 10.12

Scanner et IRM avec injection.
Aspect caractéristique d’un « lâcher de ballons » cérébral, avec multiples métastases visibles.



Fig. 10.13

À gauche, scanner sans injection de produit de contraste : hyperdensité spontanée pariétale droite (hématome), accompagnée d’une hypodensité centrale (tumeur) et périlésionnelle (œdème) ; il s’agit d’une métastase hémorragique de mélanome. À droite, IRM en séquence écho de gradient : hyposignal marqué, pariétal gauche (hématome), accompagné d’un œdème périlésionnel devant faire suspecter une tumeur sous-jacente ayant saigné.


Il existe plusieurs options thérapeutiques :

  • traitements locaux : chirurgie seule, irradiation stéréotaxique de la métastase seule ou association d’une chirurgie avec irradiation stéréotaxique du lit opératoire, radiothérapie panencéphalique ou locale ;
  • traitement systémique : chimiothérapie, immunothérapie, thérapies ciblées.
    La chirurgie est indiquée dans trois situations :
  • nécessité d’une preuve histologique (cancer primitif non connu, antécédents de plusieurs cancers connus, orientation d’une thérapie ciblée) ;
  • présence d’une métastase symptomatique (déficit neurologique, HTIC) et/ou trop volumineuse et/ou avec réaction œdémateuse trop importante pour être traitée par irradiation stéréotaxique seule ;
  • but oncologique pour assurer le contrôle local d’une métastase unique.
  • Les métastases cérébrales sont les tumeurs intracrâniennes les plus fréquentes.

  • Dans 20 % des cas, elles inaugurent la maladie.
  • Dans 10 % des cas, on ne retrouve pas le cancer primitif.
  • Elles apparaissent classiquement « en cocarde » sur l’imagerie injectée (IRM, scanner).
  • Elles peuvent se révéler par une hémorragie (mélanome, rein).
  • Facteurs de mauvais pronostic : altération majeure sur l’échelle de dépendance OMS, métastases cérébrales et extracérébrales multiples.

    D Tumeurs des enveloppes

1 Méningiomes

Largement implantés sur la dure-mère, les méningiomes prennent origine à partir des cellules arachnoïdiennes. Ils représentent la tumeur intracrânienne extraparenchymateuse la plus fréquente et ont une prédominance féminine (pic de fréquence : 60–70 ans).

Technique d’implantation percutanée

Une exposition aux traitements hormonaux progestatifs doit systématiquement être recherchée. L’acétate de cyprotérone (Androcur®), l’acétate de nomégestrol (Lutényl®) ou l’acétate de chlormadinone (Lutéran®) sont trois molécules reconnues comme étant pourvoyeuses de méningiomes. L’arrêt total et définitif de ces traitements suffit dans la majorité des cas à stopper la croissance du méningiome induit, voire à permettre sa décroissance. Le suivi doit dans tous les cas être assuré en neurochirurgie, par une équipe spécialisée, sous surveillance IRM rapprochée. Il existe une contre-indication formelle à l’administration de médicaments dérivés de la progestérone chez ces patients.

Technique d’implantation SCS

Le plus fréquemment, la vitesse de croissance des méningiomes est lente. Des modifications de l’os adjacent sont fréquentes ainsi qu’une extension, parfois étendue, intéressant la dure-mère (intérêt de l’IRM). L’imagerie montre une tumeur extra-axiale, à contact méningé, qui se rehausse fortement après injection de produit de contraste (fig. 10.14 et 10.15). Les méningiomes peuvent survenir tout le long du névraxe, à l’étage intracrânien mais aussi à l’étage spinal.


Fig. 10.14

IRM sans puis avec injection, montrant le rehaussement intense d’une tumeur extraparenchymateuse à contact méningé. Méningiome.



Fig. 10.15

IRM en séquence T1 après injection de produit de contraste.
Tumeur extraparenchymateuse, bien délimitée, frontopariétale gauche, à contact méningé, avec un épaississement de la dure-mère et un fort rehaussement post-injection. Méningiome.


Le symptôme révélateur peut être une crise d’épilepsie (pour les méningiomes au contact du cortex), un déficit focal (d’expression variable selon la topographie du méningiome), ou plus rarement une exophtalmie (si le méningiome est de localisation sphéno-orbitaire).
Histologiquement, il s’agit de tumeurs le plus souvent bénignes (de grade I dans plus de 90 % des cas), parfois de forme atypique (de grade II, dans 5 à 7 % des cas), exceptionnellement malignes (de grade III, dans moins de 5 % des cas). Il existe souvent des calcifications pouvant être visibles sur le scanner.
Le traitement est essentiellement chirurgical, y compris au moment des récidives (20 % de récidive à 15 ans). L’alternative thérapeutique à la chirurgie est l’irradiation stéréotaxique, qui doit être discutée au cas par cas.


Méningiomes intracrâniens

  • Ils sont plus fréquents chez la femme entre 50 et 70 ans.
  • Ils peuvent être hormonodépendants ; il convient, en cas de méningiome, de rechercher la prise d’acétate de cyprotérone, d’acétate de nomégestrol ou d’acétate de chlormadinone, et d’arrêter tout traitement progestatif.
  • Ils se révèlent volontiers par une crise d’épilepsie ou un déficit neurologique focal.
  • Il existe des méningiomes intracrâniens et spinaux/intrarachidiens.
  • Ils sont le plus souvent bénins (grade I).
  • Ils se rehaussent fortement après injection de produit de contraste et s’accolent à la dure-mère.
  • Il existe fréquemment un œdème péritumoral.
  • Le traitement est d’abord chirurgical si possible.
  • Une radiothérapie stéréotaxique (ou radiochirurgie stéréotaxique) sans preuve histologique (imagerie caractéristique) peut s’envisager dans certains cas.

    2 Schwannomes ou neurinomes

    Les schwannomes (ou neurinomes) se manifestent par une atteinte tronculaire lorsqu’ils surviennent au niveau des nerfs crâniens (nerf vestibulocochléaire [VIII] surtout, puis nerf trijumeau [V], puis nerfs mixtes). Les schwannomes vestibulaires se manifestent par une hypoacousie de perception progressive. Leur diagnostic repose sur les explorations ORL et l’imagerie qui montrera une tumeur développée dans l’angle pontocérébelleux, centrée sur le conduit auditif interne, fortement rehaussée par le produit de contraste (fig. 10.16).


    Fig. 10.16

    À gauche, audiogramme montrant une hypoacousie de perception droite. À droite, IRM en séquence T1 après injection de produit de contraste, montrant une tumeur extraparenchymateuse, bien délimitée, au niveau de l’angle pontocérébelleux droit, centrée sur le conduit auditif interne. Neurinome du VIII.


Histologiquement, la tumeur est composée de cellules fusiformes réalisant des aspects palissadiques, avec une positivité pour le marqueur PS100.

Ce sont des tumeurs le plus souvent bénignes (grade I). Leur traitement (chirurgie ou radiothérapie stéréotaxique ou radiochirurgie stéréotaxique) sera discuté en réunion de concertation pluridisciplinaire. Ils peuvent s’intégrer dans le cadre d’une phacomatose, la neurofibromatose de type 2.

E Autres tumeurs
1 Hémangioblastomes

Les hémangioblastomes sont des tumeurs vasculaires bénignes qui surviennent essentiellement au niveau de la fosse postérieure (cervelet +++, tronc). Ils peuvent s’observer de manière sporadique ou dans le cadre d’une phacomatose : la maladie de von Hippel-Lindau. Dans ce cas, les hémangioblastomes sont volontiers multiples et peuvent également être retrouvés à l’étage supratentoriel et dans la moelle épinière.
L’IRM montre typiquement une tumeur mixte kystique-solide de la fosse postérieure, avec une prise de contraste très intense (fig. 10.17). Le traitement électif est la chirurgie d’exérèse.


Fig. 10.17

IRM en séquence T1 injectée, dans les trois plans de l’espace.
Prise de contraste au sein d’un kyste hypo-intense du cervelet. Hémangioblastome.


2 Tumeurs de la région pinéale

Voir chapitre 11.

3 Adénomes hypophysaires

Voir chapitre 12.

4 Craniopharyngiomes

Les craniopharyngiomes sont des tumeurs embryonnaires suprasellaires, qui se développent surtout chez l’enfant (voir chapitre 11).
5 Kyste colloïde du troisième ventricule

Tumeur rare, bénigne, d’évolution lente, le kyste colloïde est de topographie intraventriculaire, au niveau du troisième ventricule. Sa croissance peut obturer progressivement les foramens interventriculaires de Monro, aboutissant à une hydrocéphalie non communicante biventriculaire (fig. 10.18) (vidéo 27

).


Fig. 10.18

Deux exemples de kyste colloïde du troisième ventricule.
À gauche, IRM en séquence T1. À droite, IRM en séquence FLAIR.


Son traitement consiste en une exérèse chirurgicale qui se fait plus volontiers par ventriculoscopie (chirurgie mini-invasive). Le pronostic est le plus souvent excellent après résection.

À l’issue de cette énumération des principaux types histologiques existants, il faut bien noter qu’il n’existe pas de corrélation entre la prise de contraste en imagerie et le grade histologique. En effet, des tumeurs bénignes comme les méningiomes se rehaussent fortement (de façon homogène) après injection de produit de contraste, comme un glioblastome (de façon hétérogène) (tableau 10.4).
Tableau 10.4

Tableau récapitulatif des tumeurs intracrâniennes. Notez l’absence de corrélation entre le grade histologique et la prise de contraste à l’imagerie.

Types histologiques Grade OMS habituel Prise de contraste
Métastases Malignes En cocarde
Gliomes I Oui, possible
Gliomes II Non
Gliomes III Oui
Gliomes IV (glioblastome) Oui (hétérogène)
Méningiomes I (II) Oui (homogène)
Schwannomes I Oui (homogène)
Lymphomes cérébraux malins primitifs IV Oui (homogène, sauf si corticoïdes et immunodépression)

VI Principes des traitements

A Traitements médicamenteux symptomatiques
1 Anti-œdémateux

Ce sont les corticoïdes, 1 à 3 mg/kg par jour :

  • ils agissent sur l’œdème vasogénique ;
  • délai d’action de moins de 24 heures ;
  • attention : à la fuite potassique ; au régime sans sel ; et aux problèmes de l’utilisation au long cours (confusion, myopathie, diabète, ostéoporose) ;
  • essentiellement la méthylprednisolone et la dexaméthasone.
    2 Osmothérapies

    Ce sont le mannitol 20 % et le sérum salé hypertonique (SSH), utilisés en réanimation soit pour lutter contre une HTIC majeure chez un patient porteur d’un monitorage de pression intracrânienne, soit devant des signes d’engagement menaçant le pronostic vital à court terme.
    3 Antiépileptiques
  • Il n’y a pas d’indication à instaurer un médicament antiépileptique au long cours chez un patient porteur d’une tumeur intracrânienne de quelque nature que ce soit s’il n’a pas présenté de crise d’épilepsie.
  • À l’inverse, un médicament antiépileptique est à instaurer dès la survenue d’une première crise d’épilepsie chez un patient porteur d’une tumeur intracrânienne de quelque nature que ce soit.
  • Il faut utiliser des molécules efficaces contre les épilepsies partielles.
  • Les tumeurs peuvent être révélées par un état de mal épileptique nécessitant une prise en charge spécifique.

4 Autres

En cas de diabète insipide, la desmopressine sera utile ; lors d’une hyper-/hyposécrétion de l’antéhypophyse, un traitement endocrinien substitutif sera nécessaire. Les antalgiques non salicylés peuvent soulager les céphalées, mais ne doivent pas remplacer le traitement d’une HTIC, de même que les antiémétiques.

B Traitement chirurgical

La chirurgie des tumeurs intracrâniennes a trois principaux buts :

  • apporter le diagnostic anatomopathologique de certitude par la réalisation de prélèvements tumoraux ;
  • appliquer un traitement symptomatique de l’HTIC en corrigeant l’effet de masse ;
  • appliquer un traitement étiologique en retirant la tumeur.

La chirurgie est l’un des meilleurs traitements étiologiques de l’HTIC (réduction de l’effet de masse exercé par la tumeur, dérivation de LCS ou ventriculocisternostomie endoscopique pour le traitement d’une hydrocéphalie, etc.). La chirurgie tumorale sera discutée pour envisager une exérèse optimale (chirurgie éveillée avec cartographie peropératoire des fonctions neurologiques, chirurgie guidée par l’imagerie [navigation], chirurgie assistée par la fluorescence, implants de chimiothérapie déposés in situ dans la cavité de résection), ou à but diagnostique sous la forme d’une biopsie (en condition stéréotaxique à crâne fermé, sous navigation à crâne ouvert, ou par ventriculoscopie).
En dehors des situations d’urgence, le traitement neurochirurgical est choisi en RCP


HTIC et urgence

  • Œdème cérébral : corticoïdes.
  • Hydrocéphalie aiguë : dérivation ventriculaire externe ou ventriculocisternostomie endoscopique.
  • Tumeur hémorragique : chirurgie d’exérèse.
  • Tumeur volumineuse en décompensation neurologique : chirurgie d’exérèse.

    C Radiochirurgie stéréotaxique

La radiochirurgie stéréotaxique consiste à délivrer sur un volume cible prédéfini, en une fois et avec une extrême précision spatiale, une dose thérapeutique de rayonnements ionisants à partir d’une source de rayons X ou γ (Gamma Knife®). Ce traitement est mis en œuvre par le neurochirurgien, en concertation avec un radiothérapeute et un radiophysicien. La cible doit être petite (3 cm). Les métastases, certains schwannomes et certains méningiomes sont accessibles à ce traitement.

D Radiothérapie, chimiothérapie
Celles-ci doivent être discutées en RCP (voir plus loin).

E Évaluation de l’autonomie
L’évaluation se fait grâce au score de dépendance de l’OMS et à l’index de Karnofsky (IK), qui entrent en compte dans les propositions thérapeutiques.

F Prise en charge rééducative
La rééducation est primordiale pour les patients avec séquelles neurologiques et cognitives. Elle s’appuie sur des équipes multidisciplinaires (kinésithérapie, ergothérapie, orthophonie, neuropsychologie, etc.).

VII Autres éléments de la prise en charge

A Annonce diagnostique
L’annonce d’un diagnostic de tumeur cérébrale maligne est toujours délicate, compte tenu des conséquences majeures sur la qualité et la durée de vie du patient.
 Les recommandations du Plan Cancer indiquent que cette consultation d’annonce diagnostique doit systématiquement être faite :

  • dans un endroit calme, en prenant le temps nécessaire ;
  • en présence de la famille et d’un personnel de l’équipe soignante ;
  • avec un temps médical d’annonce, suivi d’un temps soignant pour reprendre les informations délivrées, envisager la façon dont elles ont été perçues et aider la mise en place des soins de support.
    La disponibilité est essentielle dans ce type de démarche, afin d’amener progressivement, au fur et à mesure de l’entretien, le patient à voir non plus seulement l’aspect négatif d’une telle annonce, mais aussi les possibilités thérapeutiques qui s’offrent, tant en termes d’impact sur la durée de vie que sur la qualité de vie. Il faut que le patient ait parfaitement compris chaque étape du raisonnement voire, si possible, que ce soit lui qui pose les questions qui introduiront les éléments suivants du cheminement, lui permettant ainsi de mieux comprendre le fondement des options thérapeutiques qui lui seront proposées. Il faut donc répondre aux questions du patient, mais sans lui imposer des vérités qu’il n’a pas clairement demander à entendre. Dans tous les cas, s’il est possible d’émettre des hypothèses devant le patient, il ne faut pas affirmer un diagnostic tant qu’il n’est pas avéré par l’examen anatomopathologique. Il faut insister sur la variabilité interindividuelle de l’histoire naturelle des tumeurs (que ce soit en termes d’évolution spontanée ou de réponse aux traitements), et sur la pauvreté des critères prédictifs individuels. D’abord parce qu’il s’agit d’une réalité, ensuite parce que cela préserve une part d’incertitude et donc d’espoir dans les cas les plus difficiles.

B Parcours personnalisé de soins
Le Plan Cancer définit un projet thérapeutique individualisé en fonction des impératifs techniques, mais aussi en fonction des desiderata du patient et de son entourage. Il faut proposer une aide psychologique dans le cadre de la consultation d’annonce diagnostique, mais aussi au-delà en proposant une prise en charge par un psychologue ou un psychiatre. Il convient de dire au patient que sa prise en charge sera globale, s’intégrera dans un réseau de soins, et pourra inclure une prise en charge psychologique de ses proches (enfants et conjoint en particulier).

C Réunions de concertation pluridisciplinaire
En dehors des situations d’urgence, le dossier du patient atteint d’une tumeur cérébrale primitive ou secondaire doit être discuté en RCP de neuro-oncologie. Les objectifs sont de proposer au patient la meilleure prise en charge possible. Le choix de la procédure diagnostique (biopsie ou chirurgie) peut y être discuté, même s’il reste à l’appréciation du neurochirurgien. Plus généralement, le choix thérapeutique est l’objectif principal et concerne le traitement dit « complémentaire » (radiothérapie et/ou chimiothérapie) des tumeurs malignes. En pratique, tous les dossiers dans lesquels il existe une ou plusieurs alternatives thérapeutiques peuvent faire l’objet d’une discussion en RCP. Le patient sera informé de cette démarche collégiale et des objectifs, risques et limites des procédures diagnostiques et thérapeutiques qui seront proposées à l’issue de celle-ci.

D Principes de réflexion éthique chez un patient porteur d’une tumeur cérébrale évoluée en fin de vie

  • Respect du Code de déontologie, sans spécificité liée aux tumeurs cérébrales, sinon chez les patients souffrant d’une altération du jugement en relation avec une atteinte cognitive ou présentant un trouble de la vigilance en phase terminale (voir plus loin la notion de personne de confiance).
  • Respect du choix du patient sur les conditions et le lieu de fin de vie.
  • Adaptation de l’offre de soins palliatifs.
  • Promotion et mise en œuvre des soins de support.
  • Il est également possible de s’adosser aux recommandations de la conférence de consensus de l’ANAES « L’accompagnement des personnes en fin de vie et de leurs proches » (janvier 2004).
  • La décision d’arrêt de tout traitement à visée étiologique sera prise de façon collégiale, au mieux et si possible en RCP.

E Conduite à adopter chez un patient ne pouvant pas prendre part à des décisions le concernant compte tenu de son état clinique

  • Interroger la personne de confiance : l’article L.111-6 du Code de la santé publique issu de la loi du 4 mars 2002 crée la notion de « personne de confiance ». Les personnes dont la capacité de compréhension est faible ou tronquée en raison de leur état de santé ou de leur âge se trouvent en difficulté pour consentir verbalement à des soins. Le Comité consultatif national d’éthique (CCNE) a ainsi proposé que toute personne puisse désigner un « représentant » ou « mandataire » chargé d’être l’interlocuteur des médecins au moment où elle serait hors d’état d’exprimer ses choix.
  • Dialoguer avec la famille.
  • Les soins palliatifs ont pour mission de soulager la douleur et d’améliorer la qualité de vie par une prise en charge pluridisciplinaire. La loi du 9 juin 1999 et la circulaire du 19 février 2002 tracent le droit à l’accès aux soins palliatifs.
  • Arrêté du 3 août 2016 relatif au modèle de directives anticipées prévu à l’article L.1111-11 du Code de la santé publique. Toute personne majeure peut, si elle le souhaite, faire une déclaration écrite appelée directives anticipées pour préciser ses souhaits concernant sa fin de vie.

F Information et consentement
La réalisation d’un examen complémentaire ou d’un acte thérapeutique, outre la recherche de ses contre-indications, doit faire l’objet d’une information auprès du patient. Cette démarche permet d’expliquer les bénéfices attendus et les risques encourus. Elle est particulièrement importante avant un acte chirurgical. En dehors de l’urgence, le patient a le droit à un délai de réflexion. Enfin, du fait du Plan Cancer, il y a nécessité de proposer des protocoles de recherche clinique aux patients s’ils sont éligibles.


Points clés

  • Le mode de révélation détermine la prise en charge d’une tumeur intracrânienne.
  • Ne pas passer à côté d’une hypertension intracrânienne, même paucisymptomatique.
  • Demander une imagerie toujours sans, puis avec injection.
  • Les métastases, les gliomes (notamment le glioblastome) et les méningiomes sont les trois tumeurs les plus fréquentes du système nerveux central.
  • Les gliomes diffus de grade II (ou de bas grade de malignité) ne sont pas des tumeurs bénignes mais précancéreuses.
  • Le diagnostic des tumeurs intracrâniennes repose sur l’analyse de l’imagerie (IRM multimodale) et des critères histologiques et de biologie moléculaire.
  • Le traitement dépend de la localisation tumorale, de l’état général (niveau d’autonomie) et du diagnostic histomoléculaire : chirurgie d’exérèse si possible, mais en mettant bien en balance le bénéfice oncologique et le risque fonctionnel (notion de survie et de qualité de vie).
  • Discuter les traitements en réunion de concertation pluridisciplinaire.
  • Importance du traitement symptomatique et de confort.
  • Mesures d’accompagnement.

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